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Les nouvelles règles du recrutement sportif

En matière de droit du Sport, et notamment en matière de recrutement, l’apport de la Jurisprudence est indéniable.

1- Le premier arrêt fédérateur en la matière concernait Monsieur Jean-Marc BOSMAN, à propos de la fin de son contrat avec le RFC LIEGE, le Club Belge exigeant une indemnité de transfert au Club de DUNKERQUE accueillant Monsieur BOSMAN. La Cour de Justice Européenne (CJCE), le 15 décembre 1995, pose le principe de l’application aux sportifs du droit de libre circulation de tout travailleur.

En dehors de ce principe fondamental, à l’occasion de cette affaire, la CJCE a également annoncé que le nombre de ressortissants de l’Union Européenne au sein d’une équipe n’est pas limitatif, et a supprimé par voie de conséquence les indemnités de transfert en fin de contrat (à la différence des indemnités de transfert en cours de contrat).

Le champ d’application de l’arrêt BOSMAN concerne l’ensemble des membres de l’Espace Economique Européen[1].
2- Moins médiatisée, une autre affaire a été jugée par le Conseil d’Etat en France, étendant considérablement le champ d’application de l’arrêt BOSMAN.

En effet, l’arrêt du Conseil d’Etat concernant la basketteuse Polonaise Lilia MALAJA du 30 décembre 2002 pose le principe selon lequel les Pays signataires avec l’Union Européenne d’un accord de coopération doivent se voir appliquer les règles issues de l’arrêt BOSMAN[2].

Ainsi, les sportifs des Pays de l’ex-URSS (13 Pays), des 3 Pays d’Europe Centrale, des 3 Pays des Balkans, de la Turquie et des 3 Pays du Maghreb, tous signataires d’un accord de coopération avec l’Union Européenne bénéficient dorénavant du principe de libre circulation à l’intérieur de l’Union Européenne et de la non-limitation des ressortissants de ces Pays dans une équipe de l’Union Européenne[3].

Les faits de cette affaire étaient les suivants : la basketteuse de Nationalité Polonaise Lilia MALAJA s’était vue refuser par la Fédération Française de Basket sa licence après avoir signé avec le club de STRASBOURG. Les motifs invoqués par la FFB tenaient au nombre de joueuses extra-communautaires déjà intégrées au Club de STRASBOURG. La Cour Administrative de NANCY, par un arrêt du 3 février 2002, puis le Conseil d’Etat, par un arrêt confirmatif du 30 décembre 2002, ont annulé la décision de la FFB en raison de l’accord de coopération signé en 1991 entre l’Union Européenne et la Pologne.

Etait en cause l’article 8-1 du Règlement Sportif Particulier applicable au Championnat de la Ligue Féminine de Basket Ball. Cet article limite en effet à 2 le nombre de joueuses par club n’ayant pas la Nationalité de l’un des Pays de l’Espace Economique Européen, autorisées à participer aux Championnats de la Ligue. Le Conseil d’Etat a considéré que cet article créait une discrimination directement fondée sur la nationalité et ainsi était contraire au principe de non discrimination à l’encontre de ces joueuses, tel que convenu dans l’accord de coopération précité.

Le champ d’application de l’arrêt BOSMAN devient donc considérable puisqu’il s’applique dorénavant à 22 nouveaux Pays.

3- Cette décision a connu récemment une importante extension par la confirmation de ses principes, par un arrêt du 8 mai 2003 de la CJCE. Il s’agissait en l’espèce du cas du handballeur de Nationalité Slovaque Maros KOLPAK, recruté par le Club d’ÖSTRINGEN (Allemagne) et qui se voyait opposé à nouveau, comme dans l’affaire MALAJA, les quotas de Nationalité[4].

La CJCE confirme, dans les mêmes termes que le Conseil d’Etat dans l’affaire MALAJA, la non application des quotas de Nationalité aux ressortissants des Pays signataires d’accords de coopération avec l’Union Européenne :

La CJCE considère que l’accord de coopération ‘s’oppose à l’application à un sportif professionnel de nationalité Slovaque, régulièrement employé par un Club établi dans un Etat membre, d’une règle édictée par une fédération sportive du même Etat, selon laquelle les Clubs ne sont autorisés à aligner, lors des matchs de championnat ou de coupe, qu’un nombre limité de joueurs originaires de Pays tiers qui ne sont pas partie à l’accord sur l’Espace Economique Européen‘.

La CJCE va plus loin, puisqu’elle considère que doivent également se voir appliqués ce principe de non limitation des quotas les ressortissants des Pays signataires des accords de COTONOU du 23 juin 2000 avec l’Union Européenne[5], ainsi que les ressortissants de 77 Pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.

En conclusion, les règles du recrutement sportif s’alignent à la lettre sur les règles de recrutement de tout travailleur au sein de l’Union Européenne.

Le principe de la parfaite égalité de traitement des ressortissants des accords de coopération s’applique, comme entre ressortissants Communautaires, notamment sous l’angle de la libre circulation des travailleurs, qu’il s’agisse d’un sportif ou non.

Il convient de noter également que la CJCE a reconnu le droit aux ressortissants des Pays signataires de ces accords le droit de l’invoquer devant les Juridictions Nationales de l’Etat membre d’accueil, constatant leur effet direct.

Ainsi, les règles éditées par les Fédérations Sportives, et notamment celles qui déterminent les conditions d’exercice à une activité salariée par les sportifs professionnels, ne peuvent se soustraire aux règles de droit commun.

Ces arrêts revêtent une importance considérable, à la veille de l’élargissement à 25 Pays de l’Union Européenne[6].

Deux grands principes sont ainsi affirmés :

– le principe de la libre circulation, qui concerne tous les travailleurs à l’intérieur de l’Espace Economique Européen, 25 Pays en 2004,

– le principe de non-discrimination énoncé par les arrêts MALAJA et KOLPAK, qui interdit la discrimination d’un sportif Etranger se situant sur le Territoire National.

Selon les propos de Philippe PIAT, Président de l’UNFP[7] (Union Nationale des Footballeurs Professionnels), certains secteurs, comme le Football Professionnel, envisagent de proposer des mesures définissant les conditions de l’accès à l’emploi en France pour des ressortissants non Communautaires. Ceux-ci pourraient se voir soumettre à une autorisation de travail soumises aux conditions suivantes :

1) être joueur International A dans son Pays, comptant au moins une sélection,

2) se voir proposer un salaire 3 fois supérieur au moins au minima du premier contrat professionnel de la Charte,

3) que l’accès de tels joueurs non communautaires, ressortissants d’un Pays signataire d’un accord avec l’Union Européenne, soit limité à un seul joueur par Club de Ligue 1 et de Ligue 2.

Le sort des quotas dans le cadre du recrutement sportif semble donc en voie d’abandon. La pratique tentera-t-elle de limiter l’impact de ces décisions sur le recrutement national par d’autres mesures ?


[1] Les Pays bénéficiant de l’arrêt BOSMAN sont les suivants : Pays de l’Union Européenne (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Eire, Finlande, France, Grèce, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède) et les Pays de l’Espace Economique Européen (Norvège, Islande)

[2] Conseil d’Etat, 30 décembre 2002, statuant au contentieux, n° 219646, Recueil Lebon, http://www.legifrance.gouv.fr

[3] Les Pays bénéficiant de l’arrêt MALAJA sont les suivants : Algérie, Arménie, Azerbaïdjan, Bélarus, Bulgarie, Estonie, Géorgie, Hongrie, Kazakhstan, Kirghizistan, Lettonie, Lituanie, Maroc, Moldavie, Ouzbékistan, Pologne, République Tchèque, Russie, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Tunisie, Turquie, Ukraine

[4] CJCE 5e Chambre, 8 mai 2003, C-438/00 http://europa.eu.int, Affaire Deutscher Handballbund eV c/ Maros KOLPAK

[5] Accords de COTONOU (Bénin) du 23 juin 2000, entré en vigueur au 1er avril 2003, signé entre 77 Pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique et l’Union Européenne

[6] Rappelons que l’élargissement de l’Union Européenne à 25 Pays à partir de 2004 concernera également l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie et la Slovénie.

[7] http://www.unfp.org

3 commentaire(s)

  1. ismaili alaoui otmane
    25 mars 2010

    bonjour, je suis un joueur international marocain de basket, resident en espagne et marié avec une espagnole et j ai la carte communitaire espagnole, je veux continuer ma carriere sportive en france, je veux savoir s il y a une possibilité d avoir un titre de sejour pour pouvoir jouer en france puisque je suis consideré comme conjoint étranger d’un ressortissant de l’UE.
    j attend votre reponse avec impatience, merci beaucoup

  2. Dofny
    24 janvier 2010

    Bonjour, j’aimerais savoir si les principes dégagés par la jurisprudence de la CJCE sont également applicables aux sportifs amateurs,parce que je suis soumis à un cas similaire où des sportifs amateurs de nationalité amériaine se voient opposés des quotas de nationalité. En effet, il existe une règle au sein de notre fédération qui nous interdit d’aligner plus de deux joueurs de nationalité étrangère sur le terrain. Merci d’avance de votre réponse.

  3. 2 mars 2008

    salut,
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