Les lois nationales existent-elles encore ?
Je constate que de plus en plus de lois nationales dépassent leur propre champ d’application territoriale.
En effet, par principe, une loi est d’application nationale, voire régionale, mais elle ne produit a priori pas d’effet sur les territoires qu’elle ne couvre pas.
Or, il est étonnant de remarquer que certaines lois, et surtout les lois américaines, font fi de ce principe pour étendre leurs effets à des territoires ou à des personnes physiques ou morales autres.
C’est l’exemple du « Patriot Act ». Il s’agit d’une loi adoptée le 25 octobre 2001 par le gouvernement Bush suite aux attentats du 11 septembre. Cette loi étend les pouvoirs du FBI dans la lutte contre le terrorisme.
Ainsi, le FBI a le pouvoir de récolter des informations sur des internautes en dehors de toute enquête officielle et d’engager une surveillance a priori du réseau internet. Ce réseau étant sans frontières, l’application de la loi ne se limite pas aux internautes de nationalité américaine et est susceptible de viser tout internaute, quelle que soit sa nationalité.
Autre illustration de cette extension de la territorialité des lois : la loi Sarbanes Oaxley. En effet, cette loi américaine est amenée à avoir un impact sur des sociétés autres que les sociétés américaines, étant donné qu’elle s’adresse aux sociétés côtées sur un marché américain, que la société soit américaine ou non. La champ d’application de cette loi est ainsi très large. En France, on évalue à une centaine le nombre de sociétés concernées et partant, soumises à la SOX.
Ces tendances se retrouvent dans les contrats présents sur internet : la plupart des sites communautaires d’origine américaine impose à leurs utilisateurs, quelque soit la nationalité de ces derniers, la loi américaine.
A titre d’illustration, la clause de compétence du site FACEBOOK est éloquente. Elle dispose : « Vous porterez toute plainte (« plainte ») afférente à cette Déclaration ou à Facebook exclusivement devant les tribunaux d’État et fédéraux sis dans le comté de Santa Clara, en Californie. Le droit de l’État de Californie est le droit appliqué à cette Déclaration, de même que toute action entre vous et nous, sans égard aux principes de conflit de lois. Vous acceptez de respecter la juridiction des tribunaux du comté de Santa Clara, en Californie, dans le cadre de telles actions ».
Idem pour le site GOOGLE qui prévoit : « Les présentes Conditions ainsi que les relations qui vous lient à Google dans le cadre de ces Conditions seront régies par les lois de l’État de Californie, sans tenir compte des dispositions de conflits de lois. Vous et Google vous engagez à vous soumettre à la juridiction exclusive des cours du comté de Santa Clara en Californie pour résoudre toute question légale en rapport avec les Conditions. Nonobstant ce qui précède, vous admettez que Google demeure en mesure de solliciter une procédure d’injonction (ou une mesure d’urgence équivalente) auprès de n’importe quelle juridiction ».
Tout ceci ne simplifie pas le travail du juriste…