Le consentement et le commerce électronique
La question du consentement mérite une attention particulière quand on aborde le contrat de commerce électronique.
L’article 1108 du Code Civil prévoit que « quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention » :
- « le consentement de la partie qui s’oblige« ,
- « la capacité de contracter« ,
- « un objet certain qui forme la matière de l’engagement« ,
- « une cause licite dans l’obligation« .
La problématique du consentement doit être envisagée avec une attention particulière, s’agissant du développement du commerce en ligne, et des contraintes inhérentes à celui-ci en matière de preuve du consentement, d’authentification de celui-ci et d’archivage et ce, quel que soit le secteur d’activité, qu’il s’agisse de produits ou de services.
- L’exigence d’un consentement éclairé
L’exigence pour la validité des contrats conclus sur Internet d’un consentement éclairé doit être envisagé à la lumière de la loi n°2004-575 pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN) du 21 juin 2004, rappelant la nécessité d’une « adaptation [du droit Français] aux exigences du développement de l’économie numérique » pour « renforcer la confiance dans l’utilisation des nouvelles technologies et conforter la croissance de ce secteur » (exposé des motifs : projet de loi du 15 janvier 2003).
Ainsi, il incombe en ce sens à toute personne proposant à titre professionnel, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de services, de mettre à la disposition de sa clientèle :
- une offre claire énonçant les différentes étapes à suivre pour conclure le contrat par voie électronique,
- les moyens techniques permettant à l’utilisateur, avant la conclusion du contrat, d’identifier les erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger,
- les langues proposées pour la conclusion du contrat,
- en cas d’archivage du contrat, les modalités de cet archivage par l’auteur de l’offre et les conditions d’accès au contrat archivé, et les moyens de les consulter par voie électronique,
- les règles professionnelles et commerciales auxquelles l’auteur de l’offre entend, le cas échéant, se soumettre.
Par ailleurs, le destinataire de l’offre doit avoir eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son prix total, et de corriger d’éventuelles erreurs, avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation.
Enfin, dès lors qu’un prix est mentionné sur un site Internet, il y a lieu d’indiquer celui-ci de manière claire et non ambiguë, et de prévoir si les taxes et les frais de livraison sont inclus.
La Jurisprudence sanctionne sévèrement les manquements à ces dispositions, destinées à assurer l’expression, par le client, d’un consentement éclairé.
Ainsi, seules des variations minimes par rapport aux photographies présentant les produits ou services contractuels sont admises par la Jurisprudence (TGI PARIS, 1e Ch, Section Sociale, 4 février 2003, n° RG 02/11174).
La Cour d’Appel de LYON (CA LYON, 7e Ch,B, 7 mars 2007, Ministère Public, Association des Nouveaux Consommateurs du Rhône et autres c/ Monsieur T.C.) a également sanctionné, par décision du 7 mars 2007, le site Internet « perenoel.fr » pour non-respect des délais de livraison, sur le fondement de la publicité mensongère, à une peine de 9 mois d’emprisonnement assortie du sursis.
Bien plus, ces dispositions ont récemment été renforcées par la loi n°2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, introduisant une obligation d’indiquer la date limite d’exécution ou de livraison des services ou produits concernés, avec une possibilité, en cas de retard de plus de sept jours par rapport au délai annoncé, d’une dénonciation du contrat emportant remboursement du consommateur.
De manière générale, au-delà de l’offre de produits ou de services elle-même, le commerçant en ligne est tenu de mettre à la disposition de son cocontractant ses conditions contractuelles, d’une manière qui permette leur reproduction et leur conservation (article 1369-1 du Code Civil). La présentation des conditions générales de vente présentées sous forme de pop-up dont le blocage peut être mis en œuvre automatiquement par certains navigateurs est donc susceptible d’être sanctionnée, de même que leur présentation dans des fenêtres trop petites les rendant difficilement lisibles (Haute Cour Régionale [DLG] de DUSSELDORF, 13 avril 2006).
Par ailleurs, la Commission des Clauses Abusives s’est prononcée, dans une recommandation 2007-02 du 24 mai 2007 sur le caractère abusif d’une clause imposant au seul consommateur la charge de la conservation des conditions générales de vente, exonérant le professionnel de toute obligation de ce chef.
Au delà de la problématique attachée au caractère éclairé du consentement, doit être envisagée la question de la forme d’expression de celui-ci, dans le contexte de la dématérialisation propre aux transactions conclues par le biais d’Internet.
- La forme d’expression du consentement
Le consentement des parties à un contrat aux obligations qui découlent de celui-ci est manifesté par la signature des parties. Cette signature, nécessaire à la perfection d’un acte juridique, identifie celui qui l’appose.
Or, l’article 1108-1 du Code Civil, introduit par la loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique précitée, prévoit que « lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique (…) ».
La loi du 13 mars 2000 (loi n°2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique) précise, en effet, que l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.
Ce principe est réaffirmé avec force dans l’article 1316-3 du Code Civil, précisant que « l’écrit sur support électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier« .
Dans ce contexte, la loi du 13 mars 2000 précise que la signature, lorsqu’elle est électronique, consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification, garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée jusqu’à preuve du contraire, lorsque la signature est créée, l’identité du signataire assurée, et l’intégrité de l’acte garanti.
Dans la pratique, ces critères sont considérés comme assurés dès lors qu’il s’agit d’une signature électronique sécurisé, au sens du décret n°2001-272 du 30 mars 2001. Celui-ci définit la signature électronique sécurisée comme celle qui satisfait aux exigences suivantes :
- être propre signataire, être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif ;
- et garantir avec l’acte auquel elle s’attache un lien tel que toute modification ultérieure de l’acte soit détectable.
Ainsi, pour remplir ces conditions, la signature électronique sécurisée doit tout d’abord être établie grâce un dispositif sécurisé de création de signature électronique. La vérification de cette signature doit ensuite reposer sur l’utilisation d’un certificat électronique qualifié.
La délivrance du certificat de conformité est rendue publique. Ledit certificat doit notamment porter mention, pour être considéré comme qualifié, de l’identité du prestataire de service de certification électronique concerné, ainsi que l’Etat dans lequel il est établi, l’indication du début et de la fin de la période de validité du certificat électronique et, le cas échéant, les conditions d’utilisation du certificat électronique, notamment le montant maximum des transactions pour lesquelles ce certificat peut être utilisé.
Pour l’heure, les seules signatures électroniques sécurisées conformes à ces dispositions sont fondées sur la cryptographie asymétrique. Cette technologie associe une clé privée propre à l’émetteur permettant de signer électroniquement le support, à une clé publique destinée à vérifier la signature électronique par les destinataires de celui-ci.
- La conservation de l’expression du consentement
Outre la question de l’expression du consentement, la question de la conservation de celui-ci doit également être envisagée. En effet, l’article 27 de la LCEN prévoit que « lorsque le contrat est conclu par voie électronique, et qu’il porte sur une somme égale ou supérieure à 120,00 euros (décret n°2005-137 du 16 février 2005), le contractant professionnel doit assurer la conservation de l’écrit qui le constate pendant un délai [de 10 ans] et en garantir à tout moment l’accès à son cocontractant si celui-ci en fait la demande« .
L’archivage électronique ainsi mis à la charge du commerçant en ligne doit, du versement du support de son environnement de création à son environnement de conservation, jusqu’à la restitution des supports archivés, en passant par la gestion dans le temps de ceux-ci, garantir l’évolutivité des supports ainsi que la fiabilité des opérations menées à ces différents stades.
A ce titre, il conviendra d’être particulièrement vigilant, en cas de recours à un prestataire externe, offrant certes l’avantage d’un certain professionnalisme, à la rédaction du contrat de service conclu avec celui-ci, afin d’y inclure des garanties indispensables en matière de confidentialité et de sécurité des informations, d’assurance professionnelle ou encore des conditions de reprise du contrat par un tiers en cas de cessation d’activité du prestataire en charge de l’archivage.
je voudrais être en contact avec l’auteur de l’article sur le consentement et le commerce électronique, étant donné que je suis aussi chercheur en droit du commerce électronique.
L’article est intéressant.
Merci
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