La facturation électronique : assouplissement législatif
On entend par facture électronique la facturation émise par voie électronique.
En France, la facturation électronique faisait l’objet d’une procédure formaliste édictée par la loi du 29 décembre 1990 (n° 90-1169, 29 décembre 1990 : JO 30 décembre). Plusieurs étapes devaient être respectées par l’entreprise désireuse de télétransmettre ses factures.
Néanmoins, la directive du 20 décembre 2001 (directive 2001/15/CE du Conseil, JOCE L n° 15/24 du 17 janvier 2002), modifiant la directive du 17 mai 1977 (directive 77/388/CE, 17 mai 1977, JOCE n° L 145 du 13 juin 1977) en vue de simplifier, moderniser et harmoniser les conditions imposées à la facturation en matière de taxe sur la valeur ajoutée, met en place un cadre juridique qui assouplit la facturation électronique entre les Etats Membres.
Cette directive s’inscrit dans un contexte d’ouverture croissante des économies et de développement du commerce électronique. L’objectif visé est la mise en œuvre d’un procédé neutre sur le plan technique et prenant en compte les textes déjà adoptés en matière de signature électronique. La technologie utilisée est laissée au libre choix de l’entreprise utilisatrice sous réserve de certaines conditions. Les Etats membres ne peuvent exiger de conditions supplémentaires de la part de Pays tiers.
Ce cadre juridique se met progressivement en place en Europe, et notamment en France, notamment par la loi de Finances rectificative 2002, du 30 décembre 2002 (loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002, article 17 Finances, rectificative pour 2002, JO du 31 décembre 2002).
Cette loi entre en vigueur le 1er juillet 2003. Cette loi transpose les directives précitées. La France est l’un des premiers Pays de l’Union Européenne à transposer cette directive.
Déclaration du système de télétransmission à la Direction Générale des ImpôtsEn cas de mise en œuvre d’un système de télétransmission de factures, les entreprises devaient en informer le Service des Impôts territorialement compétent.
Selon la loi, cette disposition ne s’appliquera plus après le 31 décembre 2005. La transposition de la directive assouplit le régime intérieur qui nécessitait le dépôt d’un dossier de facturation par voie électronique, l’Administration disposait alors d’un délai de 6 mois pour se prononcer.
Conditions de recours à la facturation électronique Le recours à la facturation électronique est soumis à l’acceptation du destinataire.
Le système utilisé doit présenter des garanties techniques assurant sa fiabilité, qui doivent être équivalentes à celles de la facture sur papier et permettre de substituer la facture télétransmise par un original de facture sur papier. Le principe général retenu est le suivant : les factures transmises par voie électronique sont acceptées à condition que l’authenticité de leur origine et l’intégralité de leur contenu soient garantis.
Selon la directive, les garanties sont apportées soit par le recours à un moyen de signature électronique avancé[1], au sens de la directive 1999/93/CE du Parlement Européen et du Conseil, soit au moyen d’un échange de données informatisées (EDI) que définit la recommandation de la Commission du 19 octobre 1997 concernant les aspects juridiques de l’échange de données informatisées, soit d’autres méthodes acceptées par les Etats membres concernés.
En ce sens, le nouvel article 289 du Code Général des Impôts n’exige pas le recours à la signature électronique certifiée, il remet à un décret les modalités pratiques de signature. Le nouvel article 289 5e du Code Général des Impôts propose de procéder à la dématérialisation des factures par :
– le recours à un moyen de signature électronique,
– le recours à un message structuré selon une norme convenue entre les parties doit être traité automatiquement et de manière univoque.
En toute hypothèse, les informations émises et reçues durant l’échange doivent être identiques. En conséquence, dans l’attente du décret d’application à intervenir, il semble que les solutions techniques actuellement adoptées correspondent à ces exigences.
Certaines procédures de contrôle doivent être respectées lors de l’établissement d’un système de facturation électronique, telles que la conservation des informations dans l’ordre chronologique de leur émission par l’émetteur, de leur réception par le récepteur, l’établissement d’une liste récapitulative sur papier des messages… (Code Général des Impôts article 289 bis 3e).
Dans le cas de lots comprenant plusieurs factures transmises par voie électronique au même destinataire, les mentions communes aux différentes factures peuvent être mentionnées en une seule fois dans la mesure où, pour chaque facture, la totalité de l’information est accessible.
Conservation En matière de facturation électronique, la conservation sera réalisée par des supports informatiques, et pendant la même durée prévue à l’article 102 b du Livre des Procédures Fiscales. Le contrôle de l’Administration est réalisé à partir des fichiers de factures échangées. Toutefois, l’Administration Fiscale est en droit de demander une restitution des informations sur support papier.
On peut envisager que l’entreprise conserve ses données informatisées sur des supports différents selon la période visée : pendant les trois premières années, les informations seraient conservées sur support informatique, et pendant les trois années suivantes, l’entreprise les conserverait sur tout support de son choix (les trois premières années concernent le délai de reprise de l’Administration Fiscale, et les trois années suivantes le droit de communication).
Cette obligation d’archivage pèse à la fois sur l’émetteur et sur le destinataire de la facture, qui doivent la conserver dans le format de la télétransmission.
Stockage des factures La directive prévoit la possibilité pour l’assujetti de déterminer lui-même le lieu de stockage des factures, à condition de les mettre à la disposition des autorités compétentes sans retard injustifié dès la réquisition. La directive prévoit la possibilité pour les Etats membres d’exiger leurs assujettis à déclarer le lieu de stockage s’il est situé en dehors du Pays considéré, voire l’obligation de stocker les factures à l’intérieur du Pays.
Il est expressément prévu la possibilité d’un stockage par voie électronique garantissant un accès complet et en ligne aux données stockées. Les garanties techniques exigées lors de l’envoi et de la réception de la facture continuent à courir pendant la période de stockage. L’authenticité de l’origine et l’intégrité du contenu des factures, ainsi que leur lisibilité, doivent être assurés pendant toute cette durée. Les données que contiennent les factures ne peuvent être modifiées et doivent rester lisibles pendant toute cette durée.
La directive prévoit par ailleurs explicitement que l’établissement de la facture doit pouvoir être délégué à une tierce personne (sous-traitance) ou au client (autofacturation). Toutefois, quelles qu’en soient les modalités d’établissement, l’assujetti reste le seul responsable de son émission.
La directive Européenne décrit également les mentions obligatoires devant figurer sur les factures.
Modalités de contrôle de l’administration : contrôles inopinés en matière de facturation électronique
Il appartient à l’entreprise qui émet ou reçoit des factures électroniques, qu’elles soient ou non matériellement émises ou reçues par un tiers, de tenir à disposition de l’Administration Fiscale une liste récapitulative séquentielle de tous les messages émis ou reçus et de leurs anomalies éventuelles. L’assujetti conserve l’entière responsabilité de ses obligations en matière de facturation et de leurs conséquences au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, quel que soit le mandat émis à un client pour l’établissement de la facture, ou le recours à un prestataire.
La loi de transposition de la directive du 20 décembre 2001 prévoit que les agents de l’Administration peuvent intervenir de manière inopinée dans les locaux professionnels tant des entreprises émettrices et réceptrices des factures, et notamment des factures électroniques, que, s’il y a lieu, dans les locaux professionnels des prestataires de services de télétransmission.
Le contrôle a pour objet de vérifier la conformité du fonctionnement du système de télétransmission aux exigences de la loi. En fait, le système utilisé doit être neutre, les moyens techniques mis en place ne doivent avoir pour effet de modifier ou d’altérer les données transmises. Le système de dématérialisation sera considéré comme conforme si le fichier émis et le fichier reçu sont identiques dans leur format et dans leur contenu.
Dans l’hypothèse d’un recours à un tiers, l’entreprise doit toujours être en mesure de restituer à l’écran ou sur papier le fichier des partenaires et la liste récapitulative, dans un langage clair. On entend par langage clair un format habituellement admis par les usages commerciaux (de type AFNOR).
En cas d’impossibilité de procéder au contrôle du système, ou de manquements aux conditions posées par la loi, les agents de l’Administration pourront dresser un procès-verbal. Dans les trente jours de la notification du procès-verbal, le contribuable peut formuler ses observations, apporter des justifications ou procéder à la régularisation des conditions de fonctionnement du système. Au-delà de ce délai et en l’absence de justification ou de régularisation, les factures litigieuses ne pourront être considérées comme facture d’origine (article 289 bis 4e).
Dans tous les cas, il appartiendra au contribuable de restituer l’ensemble des données à l’Administration. En conséquence, en cas d’externalisation du stockage ou de recours à un tiers (contrat de type ASP), il conviendra d’être vigilant sur les engagements contractuels en termes de restitution des informations et de leur contrôle. Les informations doivent pouvoir être restituées en langage clair.
La liste des informations devant être stockées doit également être contractualisées ainsi que l’ensemble des fichiers d’anomalies ou d’erreurs. Le contrôle de l’Administration consiste généralement à comparer divers fichiers de factures émis et reçus par des clients et fournisseurs de l’entreprise. Dans le contexte d’une harmonisation Européenne de ces facturations électroniques, le contrôle des facturations électroniques entre Etats membres sera possible, mais nécessite la mise en place de critères d’évaluation des systèmes de télétransmission. A ce titre, la directive prévoit un droit d’accès entre Etats membres aux factures stockées par voie électronique dans un autre Etat membre.
[1] On entend par signature électronique avancée ou certifiée, au titre de la directive 1999/93/CE, et la loi de transposition du 13 mars 2000 (loi n° 2000/230, 13 mars 2000, JO 14 mars 2000, et son décret d’application du 30 mars 2001, décret n° 2001-272, 30 mars 2001, JO 31 mars 2001) une signature unique qui permet d’identifier le signataire, et qui est créée par des moyens que le signataire peut garder sous son contrôle exclusif, qui permet de détecter toute modification ultérieure des données. Selon le décret du 30 mars 2001, une signature certifiée est une signature ayant recours à des prestataires de services de certification (voir également décret du 18 avril 2002, n° 2002-535, relatif au schéma d’évaluation et de certification, et l’arrêté du Ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie relatif à la reconnaissance de la qualification des prestataires de certification électronique et à l’accréditation des organismes chargés de l’évaluation du 31 mai 2002, JO 132 du 8 juin 2002).
Dans tous les cas, il appartiendra au contribuable de restituer l’ensemble des données à l’Administration. En conséquence, en cas d’externalisation du stockage ou de recours à un tiers (contrat de type ASP), il conviendra d’être vigilant sur les engagements contractuels en termes de restitution des informations et de leur contrôle. Les informations doivent pouvoir être restituées en langage clair.