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La création salariée

Diverses conventions, et notamment la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne du 18 décembre 2000 (article 17.2) reconnaissent le principe général selon lequel les droits d’auteur naissent sur la tête de la personne physique ayant créé l’œuvre, salariée ou non.
L’article L.112-1 du Code de la Propriété Intellectuelle pose le principe selon lequel la protection du droit d’auteur peut être acquise à toutes les œuvres de l’esprit. Aucune catégorie n’est à exclure.

Les exemples sont alors nombreux de la création d’œuvres à l’intérieur de l’entreprise.
Sont visées bien entendu les entreprises dont l’objet même correspond à des activités de création, telles que les domaines de la publicité, de la presse, des jeux vidéo, de formation, de création de bases de données, de production audiovisuelle, etc.
Sont également visées des entreprises pour lesquelles la création ne constitue pas le cœur de leur activité, mais une mission dévolue à un ou plusieurs salariés.
Dans ce contexte, le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique(CSPLA) a reçu mission de faire des propositions consensuelles sur la création salariée en vue d’une future loi sur le sujet.
L’équilibre est délicat entre, d’une part, le respect des droits d’auteur, et, d’autre part, la garantie pour l’employeur qu’il pourra exploiter en toute liberté et en exclusivité les droits issus de la création du salarié rémunéré à cet effet et qu’il pourra garantir ses clients qu’il en est bien titulaire.
La solution retenue par le Code de la Propriété Intellectuelle est simple sur le plan théorique : seule une transmission des droits répondant à un formalisme certain (article L.131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle) permet à l’employeur d’être considéré comme cessionnaire des droits d’auteur de son salarié.
Cette cession doit être réalisée œuvre par œuvre et ne peut être prévue globalement en une seule fois par le contrat de travail puisque le Code de la Propriété Intellectuelle prohibe la cession globale des œuvres futures.
En pratique, l’application de ce principe s’avère particulièrement délicate.
Pour ces raisons, le CSPLA, par sa commission « Création Salariée », a tenté de trouver un consensus sur ce sujet.
Les Collèges « Employeurs » et « Auteurs Salariés » ont notamment travaillé sur la base d’un avant-projet de texte proposé en Janvier 2002 par le Ministère de la Culture et de la Communication. Ce projet a proposé plusieurs modifications :

1) Le principe des apports des droits des auteurs salariés à une société de perception et de répartition des droits à l’interlocuteur de l’employeur pour toute autorisation ou cession d’exploitation,

    2) Le principe de la levée de la prohibition de la cession des œuvres futures pour les contrats de travail à durée indéterminée,3) La limitation de la cession à une durée de cinq années,

    4) Une obligation d’exploitation permanente et suivie et d’une diffusion commerciale selon les usages de la profession pour l’employeur des œuvres créées par ses salariés.

La rémunération supplémentaire due au salarié doit être conforme au Code de la Propriété Intellectuelle, et à des accords collectifs de branche ou d’entreprise qui seraient négociés sur ce sujet. En cas d’échec des négociations collectives, une commission présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire trancherait.
Or, il est apparu des discussions successives sur ce projet des discordances majeures entre les points de vue des employeurs d’une part et des auteurs salariés d’autre part, qui portent :

1) Sur la question de la rémunération des auteurs en dehors du salaire : en dehors du secteur de la presse, qui, en majorité, a négocié des accords d’entreprises, cette question reste fondamentale.

    2) Le second point de désaccord concerne la question des apports des œuvres des salariés à une société de perception et de répartition des droits. En effet, l’employeur se voit alors privé de la maîtrise de l’exploitation des droits afférents aux créations de l’auteur salarié.

Des questions subséquentes se posent, comme notamment la valeur de l’entreprise si les actifs liés à la création des salariés n’appartiennent pas à l’entreprise.
Il apparaît également que les usages varient profondément selon les secteurs d’activité concernés. Le secteur des jeux vidéo, par exemple, n’a pas développé les mêmes usages et les mêmes accords que la télévision.
Les travaux de la Commission concluent donc au blocage des positions retenues de part et d’autre. Aucun consensus n’a pu être dégagé. Le législateur aura la lourde tâche de trancher.
Le régime des auteurs agents publics a, quant à lui, fait l’objet d’une réforme par la loi DADVSI du 1er août 2006, le rapprochant ainsi du régime applicable aux autres salariés.
Toutefois, certains aménagements subsistent. Ainsi, une cession de plein droit au profit de l’Etat est instituée dans la mesure strictement nécessaire à l’accomplissement par celui-ci d’une mission de service public, lorsque l’œuvre est créée par l’agent dans l’exercice de ses fonctions ou d’après les instructions reçues. Il ne s’agira en revanche que d’un droit de préférence au profit de l’Etat lorsqu’est envisagée une exploitation commerciale de l’œuvre.
Rappelons que la problématique visée ci-dessus ne concernent pas les logiciels, qui font l’objet d’une exception au titre de l’article L.113-9 du Code de la Propriété Intellectuelle, qui prévoit le principe de la dévolution des droits patrimoniaux à l’employeur sous réserve du respect du droit moral de l’auteur par l’employeur.
De même, l’employeur est investi du droit d’auteur à titre initial lorsque l’œuvre répond à la définition de l’œuvre collective au sens de l’article L.113-2 alinéa 3 du Code de la Propriété Intellectuelle.


BIBLIOGRAPHIE


La synthèse des travaux de la Commission sur les droits des auteurs salariés de droit
privé est disponible à l’adresse suivante : www.culture.fr/culture/cspla/conseil.htm