Droits musicaux: comment calculer la réparation du préjudice
Les atteintes au droit des musiciens sont réprimés selon les principes généraux de la propriété intellectuelle.
Certes, la musique appartient au régime général des droits d’auteur, néanmoins, la spécificité de sa diffusion permet d’imaginer des modes de réparation plus objectifs et opportuns qu’un montant forfaitaire défini arbitrairement.
1. Analyse des actes de contrefaçon
L’article L335-2 du Code de la Propriété Intellectuelle prévoit que : « toute édition d’écrit, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de tout autre production imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs est une contrefaçon, et toute contrefaçon est un délit« .
En matière de musique, la Jurisprudence considère qu’il y a contrefaçon lorsque, à l’édition des enregistrements superposés des deux œuvres, les différences entre deux chansons sont si faibles que l’on a l’impression d’entendre une seule chanson (CA PARIS, 19 novembre 1985). La recherche se fera par l’examen des ressemblances harmoniques, mélodiques et rythmiques, en examinant la possibilité qu’une rencontre fortuite, à raison, par exemple, de la simplicité de la mélodie ou de l’existence de sources communes du rythme des deux œuvres, puisse expliquer les ressemblances entre celles-ci (CA PARIS, 25 avril 1972).
L’article L335-3 du Code de la Propriété Intellectuelle ajoute qu’est également un délit de contrefaçon « toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit, en violation des droits de l’auteur« .
2. Réparation du préjudice
Le préjudice résultant de cette exploitation sans droits des œuvres réalisées par un auteur peut être évalué par deux moyens distincts :
- La première possibilité repose sur une simulation des redevances qui auraient pu être exigées par la SACEM si le contrefacteur avait sollicité une autorisation préalable de reproduction.
Le pourcentage correspond généralement à 8 % du prix de vente HT au détail, sur lesquels peuvent s’appliquer des abattements.
Une redevance minimum est alors définie. Le calcul de cette redevance correspond, pour un CD reproduisant jusqu’à 20 œuvres ou 40 fragments, à :
0,4955 x le nombre d’exemplaires commercialisés x 1,065
(redevance TTC incluant la sécurité sociale de l’auteur et la TVA).
Le préjudice se calcule alors selon le manque à gagner direct de l’auteur.
- Il est également possible d’établir le montant du préjudice dont il est possible de demander réparation en se fondant sur les décisions précédemment rendues :
- s’agissant de la reproduction sur une sonnerie de téléphone d’une chanson de MC SOLAAR, à 60.000,00 euros (CA PARIS, 16 septembre 2005) ;
- s’agissant de la reprise mélodique d’une œuvre musicale à succès, à 300.000,00 FF [soit 45 734.71 euros] (CA PARIS, 19 novembre 1985) ;
- s’agissant de l’utilisation d’une œuvre à des fins publicitaires sans autorisation, à 90.000,00 FF [soit 13 720.41 euros] (CA VERSAILLES, 28 septembre 1995) ;
- s’agissant du préjudice moral, à 100.000,00 FF [soit 15 244.9 euros], et du préjudice commercial, à 100.000,00 FF [soit 15 244.9 euros] (CA PARIS, 17 février 1999).
Les juges du fond ont en la matière un pouvoir souverain d’appréciation du montant du préjudice subi par l’auteur. Peut également s’ajouter à ce préjudice matériel un préjudice moral, notamment en cas d’atteinte aux prérogatives d’ordre moral, comme le droit à la paternité (TGI PARIS, 13 novembre 1970).
En complément, l’article L335-6 du Code de la Propriété Intellectuelle prévoit que le Tribunal peut prononcer la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par l’infraction, ainsi que celle de tous les phonogrammes, vidéogrammes, objets et exemplaires contrefaisants, reproduits illicitement, et du matériel spécialement installé en vue de la réalisation du délit. Cette sanction peut être prononcée par une juridiction civile en dehors de toute sanction pénale.
En conclusion, il importe que le dossier présenté devant le Juge comprenne le maximum d’informations sur le manque à gagner réel de l’auteur subissant l’atteinte.
Le producteur verra également son préjudice réparé sur le fondement de son droit de reproduction mécanique.
Blandine Poidevin, Avocat
Chargée d’enseignement à l’Université de Lille 2
Viviane Gelles, Avocat
Le préjudice dépend essentiellement de l’étendu de la contrafaçon que vous arrivez à prouver.
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