CGV : l'avenir de la case à cocher
La Cour de Justice de l’Union Européenne, saisie d’une demande de décision préjudicielle portant sur la directive 97/7/CE du 20 mai 1997 relative à la protection des consommateurs en matière de contrat à distance, s’est, dans un arrêt du 5 juillet 20121, prononcée sur différentes questions ayant trait à la mise à disposition, sur un site Internet, des conditions générales de vente.
L’article 5 de la Directive en question prévoit que « le consommateur doit recevoir, par écrit ou sur un autres support durable à sa disposition et auquel il a accès, confirmation des informations mentionnées à l’article 4 [identité du fournisseur, caractéristique essentiel du bien ou du service, prix du bien ou du service, frais de livraison, modalité de paiement de livraison ou d’exécution, l’existence d’un droit de rétractation, coût de l’utilisation de la technique de communication à distance, durée de validité de l’offre ou du prix …], en temps utile lors de l’exécution du contrat et au plus tard au moment de la livraison en ce qui concerne les biens non destinés à la livraison à des tiers, à moins que ces informations n’aient déjà été fournies au consommateur préalablement à la conclusion du contrat par écrit ou sur un autre support durable à sa disposition et auquel il a accès ».
La Cour de Justice de l’Union Européenne était saisie dans le cadre d’un litige opposait un prestataire proposant différents services en ligne sur son site Internet à l’organisation autrichienne chargée de la protection des consommateurs.
Les utilisateurs avaient la possibilité de télécharger des logiciels gratuits ou des versions d’essai de logiciels payants, via ce site.
Pour pouvoir utiliser ce site, les internautes devaient remplir un formulaire d’inscription.
Lorsqu’ils passaient leur commande, ces derniers devaient, en cochant une case désignée dans le formulaire, déclarer qu’ils acceptaient les conditions générales de vente et renoncer à leur droit de rétractation.
La conclusion d’un contrat d’abonnement avec le prestataire était impossible si ladite case n’avait pas été cochée.
La Cour rappelle, tout d’abord, que l’objectif du législateur de l’Union était d’éviter que l’utilisation des techniques de communication à distance ne conduise à une diminution de l’information fournie aux consommateurs.
A cet égard, elle considère que la pratique commerciale consistant à ne rendre accessibles aux consommateurs, les conditions générales de vente que par un hyperlien sur le site Internet de l’entreprise concernée, ne peut suffire à considérer la fourniture, par ledit commerçant, desdites conditions générales de vente au sens de l’article 5 de la Directive précitée, ni la réception desdites conditions par le consommateur.
La Cour a été également interrogée sur la question de savoir si un site Internet, dont les informations n’étaient accessibles pour les consommateurs qu’en passant par un lien proposé par le vendeur, pouvait être considéré comme « support durable » au sens de l’article 5 de la Directive précitée.
Le support durable doit garantir au consommateur, de manière analogue à un support papier, la possession des informations mentionnées pour lui permettre de faire valoir, le cas échéant, ses droits.
Il s’agit de permettre au consommateur de stocker lesdites informations, d’en garantir l’absence d’altération et leur accessibilité pendant une durée appropriée.
Les consommateurs doivent, en outre, avoir la possibilité de les reproduire telles quelles.
Le respect de l’ensemble de ces critères doit permettre de considérer un support comme durable au sens de ladite disposition.
La partie mise en cause dans ce litige faisait valoir que le progrès technique et les changements rapides des nouvelles technologies rendaient désormais possible l’élaboration de sites Internet pouvant garantir que les informations, sans être transférées dans la sphère de contrôle du consommateur, pouvaient être stockées, accessibles et reproduites par le consommateur pendant une durée appropriée.
La Cour, sans examiner la question de savoir si l’utilisation d’un tel site Internet pouvait satisfaire aux exigences de la Directive 97/7 et relevant que le prestataire en question n’utilisait pas un tel site, décide que « un site Internet, tel que celui en cause au principal, dont les informations ne sont accessibles pour les consommateurs qu’en passant par un lien présenté par le vendeur, ne peut être considéré comme support durable au sens de l’article 5 paragraphe 1 de la Directive 97/7 ».
Il convient de rappeler que le non respect des dispositions de cet article 5, transposé en droit français par l’article L121-19 du Code de la consommation, est passible d’une amende de 1.500€ et que, par ailleurs, le délai de rétractation non communiqué au client est porté de 7 jours à 3 mois, dans cette hypothèse.
Cet arrêt contredit la pratique française en la matière, validant l’acceptation des conditions contractuelles par opt in et liens hypertextes.
Ainsi, dans une affaire jugée par la Cour d’appel de Paris2, les magistrats avaient considéré que le fait pour un consommateur d’avoir coché une case mentionnant l’acceptation des conditions générales de vente de l’exploitant du site, lesdites conditions générales étant accessibles via un lien hypertexte, leur rendaient les conditions contractuelles opposables et les engageaient vis-à-vis de leur cocontractant.